Depuis 2003 Cambrai accueille le BetiZfest, un festival qui monte doucement mais surement en faisant la part belle aux musiques alternatives mais aussi aux tendances extrêmes métalliques. Cette année la cité du nord a vu le festival se couper en deux parties avec un premier évènement le week-end du 4 et 5 avril dans la salle de l'Eclipse et un second le week-end du 11 et 12 Avril. C'est cette grosse partie qui se déroule dans le célèbre Palais des Grottes de Cambrai que Music Waves a suivi pendant 2 jours. Le vendredi voit le festival se consacrer exclusivement au métal en alternant power, death, sludge et hardcore sur les deux scènes que présente le BetiZfest tandis que le samedi est plus éclectique avec du punk, de la chanson française et du rock.
Pour la journée de vendredi, les organisateurs ont frappé fort avec une affiche de grande qualité regroupant des formations françaises ambitieuses et deux ténors américains habitués aux grandes scènes mondiales. Deux immenses écrans géants de chaque côté de la scène et beaucoup d'espace permettent de bien savourer chaque concert. Le BetiZfest, tout en étant à taille humaine et convivial, se hisse ainsi à la hauteur de nombre de grands festivals par la qualité de son organisation.
Les hostilités débutent à 18h30 sur la BetiZarena avec General Lee. Les français ouvrent le feu sans se poser de questions et lancent la journée sous les meilleurs hospices. Leur post hardcore est brutal, fougueux et rehaussé par des passages atmosphériques très efficaces tandis que quelques percussions amènent une ambiance assez hypnotique. Dans la lignée d'un Neurosis ou d'un Kylesa le groupe est une belle découverte pour beaucoup de monde.
L'Eclipse Stage, petite scène proche de la grande et destinée aux formations d'avenir, débute avec Colossus. Nous découvrons un groupe prometteur dont le death métal à fois brutal, moderne et technique ne fait ni compromis ni concessions. Emmenés par deux chanteurs féroces la formation met une grosse claque à l'assistance assommée par une violence très maitrisée. Les nordistes sont clairement un espoir du genre à mi chemin entre Cephalic Carnage et Aborted et il faudra les suivre de prêt.
Avec Crowbar arrive un poids lourd du métal international. La formation américaine n'est pas si fréquente en France et la retrouver au programme est un réel plaisir pour les amateurs de métal massif et plombé. Porté par un Kirk Windstein toujours aussi impressionnant derrière sa barbe le groupe de la Nouvelle-Orléans distille son sludge métal avec une force et une conviction impressionnantes. Malgré les années le groupe reste un leader absolu du genre et atomise le festival à coups de riffs pachydermiques et une atmosphère sombre et glauque à souhait.
Après ce coup d'éclat Fake Off a la lourde tache d'enchainer sur la scène secondaire, le hardcore teinté de punk du groupe est efficace et direct mais assez classique. De plus en jouant un peu moins longtemps que prévu les nordistes manquent l'occasion de se faire entendre coincés qu'ils sont entre deux pointures du métal extrême.
Car Devildriver débarque et ne fait pas de quartiers. Son thrash moderne teinté de death est explosif et met le feu au festival. Dez Fafara et sa bande sont en pleine forme et servis par un son puissant. Emmené par une Dez au chant brutal mais sans faiblesses les américains démontrent qu'en matière de thrash death moderne et brutal ils étaient parmi les meilleurs sur scène.
Avec Bukowski débarque le nouveau fer de lance du hard métal français que l'on a plaisir à retrouver un peu partout en France depuis la sortie de son excellent album, Hazardous Creatures. Malgré un son capricieux, le groupe confirme tout son potentiel et aurait sans doute mérité de jouer sur la scène principale tant il est déjà plus qu'un groupe en devenir. L'énergie déployée par le groupe est toujours aussi forte et sa capacité à sonner métal tout en restant accessible est impressionnante. Il ne fait guère de doutes qu'après cette prestation le groupe aura gagné de nouveaux adeptes.
Les marseillais de Dagoba ont la lourde tache de finir cette belle journée. Lourde car il se fait déjà tard et que le public a déjà bien donné de la voix et du corps au long du programme. Mais il en faut plus pour décourager le groupe qui, porteur d'un disque de haute volée avec Post Mortem Nihil Est, va mettre le feu à la salle. Que ça soit avec 'I, Reptile', When Winter' ou encore 'The Great Wonder' et 'The White Guy' le thrash moderne du groupe fait des ravages et chaque titre nous confirme que Dagoba a clairement changé de statut pour devenir un grand du métal international et non plus juste un bon groupe français.
Ce très bon concert achève une journée particulièrement réussie qui a drainé un public conséquent confirmant la bonne santé du festival nordiste.
La journée du 12 Avril s'éloigne largement du métal pour confirmer la volonté des organisateurs de placer le BetiZfest sous le signe de la diversité musicale en mettant à l'honneur des styles plus alternatifs et moins mis en valeur dans les autres festivals. Ainsi au long de la journée le punk rock sous toutes ses formes se fera une belle place au côté de chansons françaises et acoustiques, du ska ainsi que du hard rock vintage et du métal avec la tête d'affiche Lofofora.
Et ces styles alternatifs rencontrent un joli succès auprès des amateurs. Car dans leur genre Burning Lady et leur street punk rock, Los Tres Puntos et leur ska punk endiablé ou encore Les Clache avec leur répertoire dédié aux maitres punk qu'étaient The Clash ou les célèbres Guerilla Poubelle et leur punk rock endiablé ont tous de sérieux atouts. L'assistance est variée, colorée et d'une bonne humeur communicative, le tout célébrant bien le mélange entre public punk et public plus rock.
Niveau rock ou assimilé on retiendra la prestation fun et décalée d'Andreas & Nicolas. Composé de Nicolas d’Ultra Vomit et d'Andreas d'Era Nova le groupe propose des chansons françaises hautement colorées à base de blagues de potaches à ne jamais prendre au sérieux. Ce duo, accompagné de son singe batteur, va mettre le feu à la salle, faisant même monter de nombreux fans sur scène pour un final explosif. Certes cet humour ne sera pas du gout de tout le monde mais les nantais sont sympathiques et un tél décalage fait du bien dans un milieu parfois trop sérieux.
Avec Lofofora le BetiZfest fait revenir une valeur sure de la scène métallique française et prend l'assurance d'un concert de haute volée tant le métal teinté de rock et de punk du groupe a tout pour fédérer le public présent. De retour après une prestation remarquée en 2008, Lofofora donne de plus un de ses rares concerts du moment alors qu'il va retourner en studio pour préparer son futur album.
Ce concert va s'avérer être un très grand cru et un des meilleurs de ce riche week-end. Porté par un Reuno en pleine forme, toujours aussi souriant et charismatique le groupe va nous balancer ses meilleurs titres pendant plus d'une heure sans relâcher la pression. Avec des chansons comme ‘Le Fond Et La Forme’, ‘Dur Comme Fer’ ou le final classique qu’est ‘Buvez Du Cul’ Lofofora se taille un succès monstre. Musicalement le mixe crée entre thrash, métal, punk et fusion est toujours aussi efficace et malgré les années le groupe reste un des meilleurs dans le genre éclectique.
C’est Scottland qui aura l’honneur de clôturer les festivités. Malgré l’heure tardive il reste un public conséquent, dont Reuno et Andreas & Nicolas, pour faire la fête avec le groupe nordiste et rendre hommage aux années Bon Scott d’AC/DC. Avec des pépites comme ‘T.N.T.’, ‘Down Payment Blues’ ou encore ‘Rock’n’Roll Damnation’ ils se payent un franc succès, il faut dire que musicalement et vocalement le groupe est au top et rend un hommage vibrant et sincère à la légende australienne.
Ceci clôture une édition très réussie du BetiZfest qui confirme sa bonne santé et qui reste un festival à taille humaine d’une rare sympathie. Il me reste à remercier l’organisation du festival et la ville de Cambrai pour leur travail et leur bonne humeur ainsi que le personnel du Garage Café pour sa participation.